La Préhistoire

La conjonction à Larchant de la présence d’un marais giboyeux, de petites sources, de vastes forêts sur les plateaux et de possibilités d’abris dans les massifs gréseux, permet de comprendre que cette région ait pu attirer les hommes préhistoriques, qui bénéficiaient, au fond de ce « golfe », d’un relatif isolement, à l’écart de la voie de passage que représente la vallée du Loing. Les nombreuses traces laissées dans les abris rocheux du golfe de Larchant, sous forme de gravures – comme dans beaucoup de massifs stampiens du Bassin Parisien – témoignent d’une fréquentation importante à travers les âges.

 

L’art rupestre…

La place de Larchant dans ce monde des gravures rupestres est d’abord liée au fait que cette commune possède, dans tout le Bassin Parisien, le plus grand nombre de cavités ornées, puisque l’on en compte actuellement 105. Un deuxième attrait de ces cavités tient à la variété des gravures qu’elles contiennent, depuis les ensembles de sillons usés qui sont certainement les plus anciens, jusqu’aux patronymes et inscriptions du XVIIe au XIXe siècles, en passant par diverses figurations symboliques d’époques variées, mais qui font souvent partie d’un fonds commun, que l’on peu qualifier d’Européen.

L'ensemble des gravures…

Le massif de la Dame Jouanne est particulièrement riche, avec 26 abris connus. Le plus célèbre est la « grotte aux Voleurs », qui présente un aspect très dégradé et pollué. On y distingue quand même des incisions assez bien conservées, plusieurs arboriformes. Le lieu-dit « les Crottes au Fer », situé un peu à l’écart dans le golfe, compte 17 abris gravés.

Le massif du rocher de la Justice est un chaos rocheux bien connu des varappeurs et des promeneurs, car on y trouve « l’Eléphant », gros rocher à trois jambages. Sur la bordure Nord du massif, l’abri de « la Croix du Petit Homme » est classé monument historique depuis 1954 et au Nord-Est, la grande grotte du « Chamois » recèle de beaux ensembles de sillons et quelques grilles. Plus près de Larchant, le massif de « La Roche au Diable » comporte 16 abris gravés, dont la « Cave du Diable » qui comporte, près de son entrée, une gravure de croix en ronde-bosse, d’une facture très rare dans le Bassin Parisien. C’est sur le versant Nord de la Roche au Diable que se situe la grande grotte dite « grotte à la peinture », découverte en 1959 et très étudiée par les préhistoriens.

Claude Maumené

La grotte à la peinture

En bordure du plateau grèseux, dans la partie Ouest du « golfe » de Larchant, sur le flanc Nord du massif de la « Roche au Diable », une grotte découverte en 1959 et fouillée sommairement à cette époque, a été l’objet de fouilles archéologiques au début des années 1980 par Jacques Hinout et son équipe. Cette grotte est connue sous le nom de « Grotte à la peinture » car des traces de couleur ocre – sans doute des traits digitaux – ont été relevées sur le plafond de cette grotte. La grotte domine la cuvette marécageuse du Marais, dépression fermée propice à la pêche et à la chasse et qui devait couvrir, à l’époque mésolithique, une superficie importante, de l’ordre de 300 ha.

L’établissement permanent d’hommes sur le site de Larchant s’accomplit autour de – 10 000 ans avant J.C. Auparavant, les rares trouvailles effectuées montrent quelques passages de chasseurs du paléolithique moyen (- 70 000 ans). La fouille méthodique des différentes couches archéologiques de la grotte à la peinture a permis de reconstituer le climat et les activités des hommes qui vivaient là, depuis l’époque du mésolithique jusqu’à l’âge du fer et même plus récemment jusqu’au gallo-romain et au Moyen Âge. Au mésolithique, le climat de Larchant était assez doux, favorisant un environnement boisé à dominante de noisetiers. Des coquilles de noisettes calcinées, datées de – 7 000 ans, ont été retrouvées en grand nombre dans les restes de foyers. La forêt abritait des animaux qui constituaient la nourriture des hommes et dont les ossements analysés proviennent de cerfs, chevreuils, sangliers et lièvres.

Au mésolithique, l’outillage comprend uniquement des pièces de silex que Jacques Hinout rattache au Sauveterrien (du site de Sauveterre-la-Lemance dans le Lot). Ce sont surtout des petits silex, fabriqués selon la technique des micro-burins par segmentation de petites lamelles, ce qui donne des pièces de forme géométrique, destinées à être enchâssées dans des éléments de bois, qui évoluèrent vers des pointes de flèche véritables. Certains outils servaient à préparer les peaux : grattoirs et racloirs. Enfin il faut signaler les tracoirs qui servaient à tracer les sillons sur les blocs de grès et sur les parois des grottes.

Un intérêt majeur de cette grotte est également d’avoir permis d’attribuer certaines des gravures qui s’y trouvent à l’époque mésolitique. En effet, un bloc de grès présentant des sillons gravés et un gros bloc monolithe entièrement gravé étaient en contact avec la couche mésolithique, où furent retrouvés à la fois les outils ayant servi à graver, et des restes d’activité humaine (armatures d’armes en silex, foyers, restes de faune).

D’après le bulletin de l’Association Culturelle et les publications de l’équipe de Jacques Hinout

Depuis 2020, la grotte à la Peinture est régulièrement étudiée par l’équipe de Boris Valentin. L’objectif est de dater chronologiquement les gravures du Mésolitique présentes en forêt de Fontainebleau.

Un polissoir, sauvé de l’oubli !

Au printemps 2006, le hasard a voulu que nous retrouvions la trace d’un polissoir, cité dans un inventaire des années 1970… Avec Alain Benard du Gersar(1) nous avons retrouvé sa trace sous un amas de lierre, où il pouvait encore dormir longtemps !
Pour vous y rendre, depuis la porte des Sablons, au bas du Chapitre, prendre la direction de la Chapelle-la-Reine, puis le premier chemin de terre à droite après la montée. Bifurquer à angle droit après une centaine de mètres, en longeant le bosquet jusqu’à l’embranchement d’un sentier qui descend en pente raide vers Larchant (dit « la côte aux moutons ») : ne pas emprunter ce chemin. Le polissoir est à main droite, au bord de la carrière. Il s’agit d’un des deux grès couchés, probablement à un emplacement différent de sa place d’origine. Il présente deux plages polies dont l’une est incomplète à la suite de la cassure du bloc. La taille des plages est d’une trentaine de cm de côté. Un examen à la loupe permet d’observer le lissage des grains de silice, caractéristique des zones de polissage…à défaut la main peut suffire à apprécier au toucher le lissé identique à celui d’un marbre poli. Ne manquez pas d’apprécier au passage, la vue magnifique sur le Chapitre.

D’après Claude Maumené, Bulletin Association Culturelle n°21

(1) Groupement d’étude et de recherche sur l’art rupestre, présidé par Alain Benard